L'architecture est sortie du bois

maart 16, 2023
Bron:
Fordaq Italie
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L'architecte Stéphane Cochet (AOO3 Architecture) a fort opportunément terminé sa série de soirées de conférences par le thème de la formation. Il n'a pas décalé cette soirée à cause de la réforme des retraites, même si, dans les ENSA, peut-être un peu piteux de se révolter pour un tel sujet, les étudiants ont pris la main et se questionnent sur tout, notamment sur les cursus et le rapport à la pratique. En ce sens, la tenue de la session était d'actualité.

Par contre, le contenu l'était moins, car une fois de plus, dès qu'on veut parler de formation, c'est la formation institutionnelle qui prend le dessus et c'est souvent lénifiant. Il est très difficile de construire un discours sur la formation en rapport avec l'architecture sans tomber dans les poncifs, les statistiques, les énumérations de cursus. Faut-il déjà bien poser le sujet, car la Formation en soi ne veut rien dire. Il aurait fallu s'interroger sur la question de savoir si désormais nous sommes outillés pour répondre à la demande de biosourcé à tous les niveaux.

C'est la vraie question, pas celle du maintien du trait dans un marché de poseurs polyvalents. On a déjà eu un colloque sur la formation il y a quelques mois à Paris à l'Académie du climat et le Forum Bois Construction aligne des ateliers dont un ateliers fleuve à venir à Lille le 14 avril. On sait que la relève est insuffisante, qu'il faut mobiliser, d'autant qu'il ne s'agit pas seulement de remplacer les départs à la retraite, mais de répondre à un marché qui doit croître considérablement. On entend que les formations proposées ne sont pas saturées, mais dès que quelqu'un commence à balayer devant sa porte comme Christian Fanguin de Bois PE, c'est l'union sacrée pour défendre l'acquis. C'est normal quand le sujet est abordé par des formateurs.

On aurait donc aimé des étudiants à la tribune et du débat de fond, mais au moins la soirée s'est terminée, comme toujours fort tard, par le témoignage de deux jolies femmes architecte passée par la formation ABC de l'ENSTIB, un point final voulu par Stéphane Cochet.

De toute façon, il y a à redire sur la formule et le contenu de ces dix sessions, même si l'architecte y a mis tout son coeur, secondé par FiBois et l'UICB à la fois en termes de temps et de sous. C'était effectivement une sorte d'apprentissage d'une parole plus ou moins libérée des carcans institutionnels voire industriels. Stéphane Cochet a ménagé la chèvre et le choux avec de longues périodes centrales offertes aux financeurs, mais des interventions finales souvent originales. Par ailleurs, il a institué les questions et l'interactivité comme seul le CNDB avait réussi précédemment à le faire avec l'idée des SMS de Pauget. 

Il ne faut pas non plus cracher dans la soupe, FiBois est content du matériel filmé et compte l'exploiter pour illustrer un grand nombre de thématiques. Il n'y aura pas de nouvelle session de 10 soirées, seulement des sessions ponctuelles, parce que tout cela coûte trop cher. On se demande alors où est la promesse de formation continue du PACTE. Apparemment les acteurs se forment au sein des institutions et dans ce cadre l'animateur doué qu'est le praticien Stéphane Cochet est bien lancé.

Il n'y a pas un seul comique dans cette filière de construction bois, à la différence de la paille qui en a présenté un dès la première journée de son congrès. C'est comme si construire biosourcé était en soi une activité non pas de dépressif, mais de personnes sensibles au mouvement de la terre. Jean-Luc Sandoz en enfant terrible a senti la faille mais faut-il encore que le public soit disposé à rire. Avec Stéphane Cochet, il est au moins passionné. Ce qui veut dire que s'il forme les décideurs disons parisiens et de l'échelle des services en liaison avec la construction, il va faire bouger les choses. Mais il faudrait quelques dizaines de Stéphane Cochet ou plutôt de personnalités pour changer la donnée. Et si on cherche on trouve. Ludovik Bost fait un gros travail à l'ENSA de Belleville, c'est un bon communicant. Rodolphe Maufront est convaincant à cause de sa pratique profonde de la question de la formation, et sa façon de mettre le doigt comme personne sur la question de la relève. Marie Schweitzer a tout le vécu d'une charpentière architecte mais ne parvient pas vraiment à le faire ressortir, elle qui est aussi la mémoire vivante de la construction bois depuis 50 ans.

Cela non plus n'a pas été abordé dans cette longue soirée. Penser à la qualité de l'enseignement et pas seulement aux chiffres. Penser aux ambassadeurs et moins à cette sorte de transmission de haut en bas, comme si les architectes étaient fautifs. Comme si il fallait opposer la main et l'ordinateur, alors que tout le monde sait que l'architecte est complètement soumis à son écran comme tant d'autres. Il faudrait des masterclass, des chaires, du brio, des auditeurs subjugués. Il faudrait que cette prestation de communication soit un sport et un art, une fierté au même titre que ce qui est bâti et souvent abâtardit. La formation, c'est interhumain ou pas ? C'est une question d'auto-prolongement des institutions, ou bien de réponse à la catastrophe climatique ?

Il n'y a personne pour défendre cette approche à la télé, ne rêvons pas, c'est la chasse gardée de touche pas à mon arbre. Mais la télé c'est un peu ringard tout de même, comme le suggère durant la soirée un intervenant qui se réfère aux campagnes financées par la filière, et qui lui ont valu en retour une émission comme Aux arbres citoyens. Il y a d'autres tribunes, sans doute à trouver et à développer. Mais des talents, on en a maintenant.